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Quand les écrivains parlent de Nice...

Regards littéraires

Le développement, à partir du XVIIIe siècle, de Nice en tant que ville de villégiature d’hiver de riviera, a suscité dès l’origine une très nombreuse littérature, phénomène qui perdure aujourd’hui. Une bonne partie de ces textes ont été repérés et étudiés dans le cadre de l’élaboration du dossier de candidature en vue de l’inscription de Nice sur la Liste du patrimoine mondial. Il nous a paru intéressant de partager les résultats de ce travail en mettant des extraits de ces écrits à la disposition du public par l’intermédiaire de notre site internet.

Ces textes sont d’une assez grande hétérogénéité : d’abord souvenirs de voyage, souvent sous forme de lettres, prenant parfois des allures de guide touristique, rapports administratifs… ils se sont enrichis au fil des siècles de textes plus littéraires, articles de journaux, essais, romans, journaux intimes ou correspondances…Les auteurs sont également très divers, certains sont très peu connus mais on y trouve aussi les grands noms de la littérature française et internationale.

Les textes sont regroupés selon un ordre chronologique, par siècle, du XVIIIe au XXIe siècles. Il existe bien sûr des écrits sur Nice datant d’avant le XVIIIe siècle, mais nous nous sommes limités à la période qui débute avec les premières formes de la villégiature, qu’on peut situer à Nice autour de 1760.

À chaque siècle, correspond une liste d’auteurs, classés par ordre alphabétique. Outre une notice sur chaque auteur, les extraits de leurs écrits sont présentés en deux rubriques : quelques courtes citations en première approche, à quoi s’ajoute la possibilité d’accéder à un deuxième espace, comprenant des extraits plus longs et plus nombreux.

Cette sélection n’a pas la prétention d’être exhaustive et nous serions reconnaissants aux internautes qui pourraient nous signaler d’autres auteurs dont l’existence nous aurait échappée. Leurs écrits, dès lors qu’ils seraient pertinents par rapport à notre projet, pourraient être intégrés au site, avec la mention du nom – s’il le souhaite – de l’internaute qui nous aurait adressé le signalement.

Enfin, cette anthologie n'aurait pas été aussi complète sans les indications données de façon bénévole par M. Hervé Barelli, M. Vilmos Bardosi, M. Jean-Paul Potron et M. Ralph Schor.

Bonne lecture !


XVIIIe siècle


ALBANIS BEAUMONT Jean-François

La ville de Nice est la capitale du Comté et le siège du Sénat, de l’Évêché et du Gouvernement : elle est devenue depuis quelques années un séjour de délices par le nombre des Étrangers qui s’y rassemblent dans l’hiver, fait pour y rétablir leur santé, comme pour y jouir de la douceur de son climat et de la beauté de ses campagnes, qui font toujours l’image d’un printemps délicieux. Il y a peu de Voyageurs qui aillent en Italie sans voir premièrement cette province justement célèbre.
Voyage historique et pittoresque du Comté de Nice (1787)

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CASANOVA

Nice est le séjour de l’ennui, et les moucherons y font le tourment des étrangers, car ces insectes les préfèrent aux habitants. Cependant, je m’y amusai à cause d’une petite banque de pharaon que l’on tenait au café et à laquelle Rosalie, que je forçai à jouer, gagna une vingtaine de pistoles de Piémont.
Histoire de ma vie, Tome V (1789)

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DUPATY
Jean-Baptiste Mercier

Les maisons de campagnes des environs de Nice, sont peuplées d’Anglais, de Français, d’Allemands. Chacune d’elle est une colonie. C’est là que de tous les pays du monde l’on fuit l’hiver ; Nice, pendant l’hiver, est une espèce de serre pour les santés délicates.
Lettres sur l’Italie, Lettre IV (1785)

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JEFFERSON
Thomas

[…] Nice. Je logeai à l'hôtel de York. C'est une belle taverne anglaise, très agréablement située, et la maîtresse est une femme sympathique et agréable. Il existe un autre hôtel anglais d’égale réputation. Le vin de Nice est remarquablement bon. Vous pouvez passer ici plusieurs jours très agréablement. Il s'agit en fait d'une colonie anglaise.
Jefferson’s papers, Hints to Americans Travelling in Europe, 19 June 1788

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LALANDE (DE)
Joseph Jérôme Lefrançois

La société est très brillante à Nice pendant le séjour des étrangers : mais presque tous s’en vont dans leur patrie au temps où les hirondelles y retournent. Les plaisirs en carnaval sont à Nice, presque aussi animés que dans les grandes villes de France. Ordinairement il y a un opéra italien, dans une salle jolie. On y donne toutes les semaines bal et concert alternativement. Les assemblées sont alors très nombreuses, et on y joue gros jeu.
Voyage d’un Français en Italie en 1765 et 1766 (1786)

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SMOLLETT
Tobias

Quand je suis sur le rempart et que je regarde autour de moi j'ai de la peine à croire que je ne suis pas ensorcelé. La petite étendue de pays que je vois est cultivée comme un jardin […] plein d’arbres verdoyants chargés d'oranges, de limons, de citrons, de bergamotes, qui font un tableau délicieux. Si vous examinez de plus près, vous trouverez des plantations de petits pois prêts à être récoltés, de toutes sortes de salades et de légumes excellents ; des massifs de roses, d’œillets, de renoncules, d’anémones, d'asphodèles en fleurs, le tout d'une vigueur et, d'un parfum que l’on ne trouve dans aucune fleur en Angleterre.
Travels through France and Italy -Lettres de Nice-Lettre XIII (1766)

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STARKE
Mariana

Jusque-là, les Français s'étaient montrés bienveillants, mais je vais maintenant vous raconter un événement qui va les discréditer et heurter les défenseurs de la vertu. Lorsque la République était sur le point d'envahir Nice, l'usage voulait que les clés de la ville soient remises en bonne et due forme. Étant donné que tous les responsables piémontais et niçois, tant militaires que civils, avaient maintenant disparu, l'évêque (qui, malgré de multiples sollicitations, refusait de fuir en déclarant qu'il resterait sur place pour veiller sur ses fidèles jusqu'à ce qu'il soit contraint de partir) fut alors convoqué pour organiser ladite cérémonie. Il accepta et fit alors appel à deux ou trois de ses chapelains, dont l'un d'eux s'adressait à lui en l'appelant « Monseigneur ». En entendant cela, l'orgueilleux général français s'exclama : « Il n'y a plus de Monseigneur ! Monsieur l'Abbé, s'il vous plait ». Puis, il se tourna vers l'évêque, qui portait une croix autour de son cou, et lui intima l'ordre de jeter cette babiole et de prononcer le serment patriotique, chose que l'évêque, indigné, refusa de faire. Après quoi, il fut invité à quitter la ville. De retour à son palais, il fit un malaise, mais ne tarda pas à reprendre ses esprits et s'en alla à pied sous une pluie battante vers Turin où il arriva malgré tout sain et sauf.
Lettres d’Italie (1792-1798)

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SULZER
Johann Georg

La partie méridionale de la ville est défendue contre le choc des vagues par un rempart construit en pierre. II contient des souterrains voûtés, qui servent de magasins aux marchands ; le dessus est une plate-forme destinée à la promenade. Le côté occidental baigné par le Paglio, est muni d'une forte digue de terre, revêtue d'un mur et pavée de pierres. On monte de la ville sur cette digue par un escalier ; un autre conduit au pont de pierre qu'on a bâti sur la rivière, et qui aboutit à l'un des faubourgs. La digue est par conséquent accessible des deux côtés, et Nice peut être censée une place ouverte, quoiqu'elle soit garnie de portes...
Journal d’un voyage fait en 1775 et 1776 dans les pays méridionaux de l’Europe (1780)

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VOLTAIRE

J’avais un ami genevois…malade à Lyon. Il désespérait de sa vie ; il est allé à Nice et y a retrouvé la santé. On m’a conseillé aussi d’aller à Nice et j’aurais considéré ce voyage comme indispensable si j’avais pu imaginer que M. et Mme Trudaine honorassent de leur présence ce petit coin du monde… Mais un pauvre malade dans sa quatre-vingt-troisième année ne peut guère passer les Alpes.
Correspondance. Lettre à l’intendant Trudaine (1776)

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XIXe siècle


ARENE Paul

La nymphe Lympia m’envoya un rêve. Assis sur le coin d’une borne, j’oubliai Nice et le siècle présent. Je n’entendais plus les appels des gens du port, les cris aigus et musicaux des marchands de poissons secs et d’oranges ; je ne voyais plus les petits vapeurs noirs de charbon, les cordages, les pavillons, les fins voiliers aux proues dorées et peintes, les tartanes dont la grande antenne retombe comme une aile lassée…J’étais dans la crique de Lympia : une forêt de pins mêlés de myrtes descendait des coteaux jusqu’à la mer, et les premiers colons, apportant la vigne et l’olivier, tiraient en chantant leurs bateaux légers sur le sable, près de la source.
Au bon soleil (1881)

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BALME Clément

Le voilà donc de nouveau ce pays aimé de Dieu et du soleil, où l’on vient de si loin puiser un peu de chaleur et un renouvellement de vie, et à qui j’ai dû l’année dernière, un heureux commencement de guérison et un premier retour de santé, que je verrai, je l’espère se consolider cette année. Salut ! terre heureuse et bénie, qui ignores les frimas et qui conserves toujours en ton sein et sous l’influence de ton ciel une perpétuelle jeunesse et une radieuse clarté, comme pour avertir les déshérités de la jeunesse et de la vie qu’ils retrouveront près de toi et la force de l’espoir !
Mon voyage à Nice (1863)

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BASHKIRTSEFF Marie

La voilà, cette Méditerranée après laquelle je soupirais ! Ces arbres noirs ! Et il fait justement un clair de lune qui illumine ce chemin dans la mer.
Calme parfait : ni roulement de voiture ni mouvement perpétuel de ces hommes qui me paraissaient des petits bonhommes de ma fenêtre du Grand Hôtel. Calme, silence, obscurité mal éclairée par la lune qui se cache, à peine quelques lanternes qui courent après les autres.
J’entre dans ma chambre, dans mon cabinet de toilette, j’ouvre la fenêtre pour voir le Château, toujours le même, et l’heure sonnait, je ne sais plus quelle heure, et mon cœur s’est serré. Ah ! je puis bien nommer cette année, l’année des soupirs ! Je suis un peu fatiguée ! …j’aime Nice ! […] Nice, pour moi, c’est la Promenade des Anglais. Chaque maison, chaque arbre, chaque poteau de télégraphe est un souvenir bon ou mauvais, amoureux ou commun… ! Oh ! suis-je vraiment à Nice ?...
1874, jeudi 9 septembre - Journal (1890)

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DUMAS Alexandre

Il y a deux villes à Nice, la vielle ville et la ville neuve, l’antica Nizza, et la Nice new : la Nice italienne et la Nice anglaise. La Nice italienne, adossée à ses collines avec ses maisons sculptées ou peintes, ses madones au coin des rues et sa population, au costume pittoresque, qui parle, comme dit Dante, la langue del bel pease là dove il si suona. La Nice anglaise, ou le faubourg de marbre avec ses rues tirées au cordeau, ses maisons blanchies à la chaux, aux fenêtres et aux portes régulièrement percées, et sa population à ombrelles, à voiles et à brodequins verts, qui dit : « Yès ».
Impression de voyage (1851)

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FLAUBERT Gustave

Un grand pont. Quelle différence avec la frontière espagnole de la Bidassoa, si chaude, si espagnole déjà ! Pendant le retard pour nos passeports, j’ai lu du Vincens, dans la voiture cuisante de soleil sous ses cuirs, restée dételée sur la grande route. – Déjeuner : on commence à parler italien ; la dame niçarde avec sa capeline doublée de rose, menton allongé, gueule, figure laide et aimable, nous plaignait beaucoup.
Notes de Voyages – Œuvres complètes (1910)

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GONCOURT (de)
Jules et Edmond

Lundi 16 novembre. – […] Elle [la princesse Mathilde] se lève tout à coup et quoiqu’il giboule au- dehors, elle me parle dans le vent et la pluie d’aller passer quinze jours à Nice, de voir, en famille d’amis, ce pays de fleurs et ce ciel bleu pendant l’hiver.
Journal des Goncourt, Mémoires de la vie littéraire 1866 – 1886

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HERZEN Alexandre

Lettre XII – Lettre I
30 juin 1850, Nice
Me voilà encore une fois à Nice si chaude, si aromatique, si calme et maintenant complètement déserte. …Il y a deux ans et demi, j’avais entrevu Nice, je cherchais alors des hommes, les grands centres de mouvement, d’activité ; beaucoup de choses étaient neuves pour moi, m’attiraient, me préoccupaient. Plein d’indignation, je pouvais encore me réconcilier. Plein de doutes, je trouvais encore des espérances au fond de mon cœur. Je me hâtai de quitter la petite ville ayant à peine jeté un coup d’œil distrait sur ses environs si pittoresques. Le bruit solennel del Risorgimento se répandait par toute la péninsule…Je ne pensai qu’à m’arracher au plus vite de Nice pour aller à Rome.
C’était vers la fin de 1847…Maintenant je reviens à Nice, la tête baissée comme le pigeon voyageur de la fable, ne cherchant qu’un peu de repos. Maintenant je m’éloigne des grandes cités, je fuis leur activité incessante, qui ne produit rien de plus en Occident que le désœuvrement nonchalant en Orient.
Après avoir cherché longtemps où m’abriter, j’ai choisi Nice, non seulement pour son air si doux, pour sa mer si bleue, mais aussi parce qu’elle n’a aucune signification politique, scientifique… ou autre. Je répugnais moins à aller à Nice que partout ailleurs. C’était comme un couvent tranquille dans lequel je pensais me retirer du monde.
Correspondance 1871

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KARR Alphonse

C’est en effet, une impression étrange et charmante que celle qu’on éprouve, lorsqu’on entre pour la première fois dans ce doux pays, à voir s’épanouir, sans culture, à l’état sauvage, sur le penchant des collines, les plus belles anémones et les tulipes si soigneusement cultivés dans nos jardins…
Lettre à Léon Gatayes (dans Les hivers de Nice 1864)

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LAMARTINE (de)
Alphonse

[…] Nice t’a donc prêté le bord de ses corniches
Pour te faire au soleil le nid d’algue où tu niches ;
C’est donc là que se mêle au bruit des flots dormants
Le bruit rêveur et gai de tes gazouillements !

Oh ! que ne puis-je, hélas ! de plus près les entendre !
Oh ! que la liberté lente se fait attendre !
Quand pourrai-je, à ce monde ayant payé rançon,
Suspendre comme toi ma veste à ton buisson […].
Lettre à Alphonse Karr, jardinier (1857)

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NIETZSCHE Friedrich

Me voici revenu à Nice, c’est-à-dire à la maison. […] J’entends sonner dans l’air quelque chose de vainqueur, une voix qui me donne confiance et me dit : « ici, tu es à ta place ».
[…] Bien des endroits cachés, bien des hauteurs des environs de Nice sont pour moi sanctifiés par d’inoubliables instants.
Ecce homo (1908)

Nice est le premier endroit qui fasse visiblement du bien à ma tête (et même à mes yeux) et j’enrage d’avoir été éclairé si tard sur ce point.
Lettre à Malwida von Meysenburg (1884)

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